Le Monde diplomatique, novembre 2005
Aden. Paul Nizan et les années trente. Cette publication annuelle revient sur le centenaire de Paul Nizan et évoque ceux de Jean-Paul Sartre et d’Arthur Koestler. Des articles sont consacrés au roman de Nizan, Antoine Bloyé, et à son célèbre essai Aden Arabie, préfacé par Sartre qu’inspirait, comme l’analyse un autre article, l’« ombre dévorante et évanescente » de Nizan.
Presse-Océan, 23 décembre 2005
La revue Aden célèbre les centenaires de Nizan, Sartre et Koestler
Le numéro 4 de la revue Aden. Paul Nizan et les années 30 revient sur le centenaire de l'écrivain et évoque aussi ceux de Jean-Paul Sartre et d'Arthur Koestler.
Au fil des ans, la revue Aden (créée en 2002 par le Groupe Interdisciplinaire d'Etudes Nizaniennes) s'enrichit, aussi bien sur le fond que sur la forme. La maquette du dernier numéro a ainsi été modifiée. Elle propose une thématique et met en valeur les dessins de Jean-René Kerézéon, illustrateur nantais. Plusieurs images en noir et blanc agrémentent la lecture, allègent les propos et prêtent à sourire, à l'instar de celle invitant à « ne pas confondre Aden et A.D.N, merci… » !« Je n'ai pas de ligne directrice pour les dessins, j'essaye d'ajouter un peu de sel et de humour», souligne l’illustrateur, qui a rejoint la direction de la revue avec Pierrick Lafleur, responsable des comptes rendus. « Tout le monde peut écrire, universitaires ou non. Si des gens le souhaitent, à partir du moment où l'article est bon, on le publie. Préalablement, on discute du sujet. Nous avons une volonté d'ouverture. Cela permet aussi de varier les points de vue des gens, issus de différents milieux sociaux », explique-t-il.
Articles, comptes rendus, notes de lecture ...
Dans cet esprit, en plus de spécialistes, un postier, une psychiatre, des éditeurs, un ingénieur… ont collaboré au dernier numéro d’Aden, qui célèbre les centenaires de Nizan, Sartre et Koestler.
Plusieurs articles sont ainsi consacrés à Paul Nizan et Jean-Paul Sartre (notamment pendant la Drôle de Guerre), à l'existentialisme et au communisme face au surréalisme et à Sartre au Havre, dans les années 30. Anne Mathieu, directrice de la revue, publie pour sa part deux articles, le premier sur l’« ombre évanescente de Nizan sur Sartre », le second sur « Nizan critique littéraire à Monde en 1935 ».
Parallèlement, Maurice Arpin (rédacteur en chef d’Aden) s'intéresse à « Antoine Bloyé : Intertextualité au service de la Révolution »,Nicolas Surlapierre aux « Arts et métiers depuis Nizan », Claude Herzfeld à « L'esprit de système dans Aden Arabie », Alain Flajoliet à « Nizan et la critique du spiritualisme universitaire », Michael Löwy à « Claude Cahun, franc-tireur surréaliste » et John Parkin à « Arthur Koestler en Espagne ».
Des comptes rendus cinématographiques et des notes de lecture liées aux années 30 complètent cette revue de 358 pages, bien accueillie au Salon de la revue de Paris où elle a été présentée en octobre.
S.G.
Dissidences, 26 janvier 2007
Si l'on fait exception du texte plutôt décalé de Claude Herzfeld, d'une tonalité très anticommuniste, qui fait de Nizan un « chien de garde » du stalinisme et un annonciateur, pas moins, des Khmers rouges de Pol Pot (p. 107-108), on retiendra surtout l'article de Anne Mathieu sur la période très polémiste de Nizan dans Monde, à un moment (1935) où cet hebdomadaire fondé par Henri Barbusse épouse une ligne idéologique très orthodoxe : Henri Massis, Drieu La Rochelle, André Maurois l'apprennent à leurs dépens, mais également Panaït Istrati, parce qu'il s'éloigne alors du communisme. L'auteure montre bien que Paul Nizan applique à la lettre la sentence suivante : « Nous vivons dans un temps qui presse chacun de choisir une position politique » (article du 1er août 1935, cité p. 142).
Quelques vingt-cinq années plus tard, en 1960, la même virulence anime Jean-Paul Sartre, préfaçant Aden Arabie de Nizan (publié en 1931) et s'engageant, dans le même temps par la parole, l'écrit ou les actes, en faveur des luttes de décolonisation. On peut parler, alors, effectivement d'une « ombre dévorante » (titre de la communication d’A. Mathieu, p. 193- 209) de Nizan sur Sartre lorsque celui-ci dénonce la gauche, « ce grand cadavre à la renverse, où les vers se sont mis. Elle pue cette charogne » (préface à Aden Arabie, cité p. 196). Une très stimulante réflexion de Régis Antoine sur les catégories de « peuple» et de « prolétariat », et un portrait, par Michaël Löwy, de l'artiste surréaliste, lesbienne, trotskyste, provocatrice en diable (tête rasée peinte en rose, habits d'homme) Claude Cahun, arrêtée et déportée en juillet 1944 par les nazis pour distribution de tracts antifascistes aux soldats allemands ont également retenu mon attention. Des comptes rendus de lectures et de films terminent cette livraison d'octobre 2005.
[La mise en ligne de cette revue de presse est due à Thierry Altman]